Des bisses en phase avec leur époque

Des bisses en phase avec leur époque

Une région, un territoire

Des bisses en phase avec leur époque

Jusqu’au XXe siècle, le transport et la distribution de l’eau étaient l’apanage des consortages des bisses. Cette gestion s’est progressivement régionalisée, conduisant à une fédération des acteurs principaux autour du projet Lienne-Raspille. Une convention signée avec le WWF lie préservation des écosystèmes et garantie de l’approvisionnement.

Emmanuel Reynard, professeur de géographie à l’Université de Lausanne, s’est longuement plongé dans l’histoire. L’étude Montanaqua, conduite entre 2010 et 2014 a offert aux autorités communales une vision claire sur l’évolution des bisses ou des différents usages de l’eau :

«Entre Lienne et Raspille, les bisses ressemblent aux autres bisses des vallées de la rive droite du Rhône, avec des réseaux étagés prenant leur source dans les rivières. Depuis toujours, leur rôle est essentiellement agricole. Lorsqu’ils arrivent dans les zones de la station, ils alimentent des lacs qui servent d’étangs de stockage destinés à l’irrigation des prairies. D’autres bisses, plus bas en altitude, comme le Sillonin, sont plutôt destinés à l’irrigation des vignes. 

Emmanuel Reynard, professeur de géographie à l’Université de Lausanne ©DR

Vers 1950, la modernité arrive en Valais. La construction du barrage de Zeuzier va imposer une réorganisation des réseaux et des consortages qui les gèrent :

« Depuis, les bisses ne prennent plus forcément leur source dans la Lienne, mais plutôt dans les installations hydroélectriques. Les exploitants au bénéfice de concessions sont autorisés à utiliser les eaux de surface pour fabriquer de l’énergie. Ce nouvel usage s’est ajouté aux usages existants, perturbant les acteurs traditionnels.

Il y a donc effectivement un usage concurrentiel. Les droits d’eau datant de la fin du Moyen Âge ont dû être protégés par des mentions juridiques dans les concessions hydroélectriques. »

Un peu à la même époque, des sections de bisses difficiles d’entretien ont disparu. Le bisse du Ro, par exemple, a été remplacé par le tunnel du Mont-Lachaux. Plus tard, une prise de conscience s’est opérée et des actions ont été entreprises pour le valoriser, ainsi que d’autres ouvrages à grande valeur touristique et patrimoniale ou situés dans des paysages spectaculaires. Les consortages ancestraux aussi ont vu leurs rôles évoluer :

 De nombreux consortages sont actifs, mais il m’est difficile d’en préciser les rôles tant il existe de cas particuliers. En Valais on peut constater un phénomène d’hybridation entre les différents usages et modes de gestion communautaire, publique, ou privée. »

À Crans-Montana, le projet Lienne-Raspille, a initié un gros travail d’intégration destiné à répondre aux questions portant sur l’accès à l’eau ou à la mutualisation des infrastructures, liant eau potable, irrigation et production d’énergie. La protection des biotopes fragiles est garantie par la convention passée avec le WWF. Quant aux grands bisses, ils jouent un rôle touristique important et ne risquent pas de disparaître.

Plus d’infos : Conférence vidéo d’Emmanuel Reynard sur l’étude Aquamontana : rec.unil.ch

Légende photo : En plus de leur utilité dans la distribution de l'eau, les bisses présentent un intérêt touristique certain. ©Pierre-Armand Dussex



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