Ils nous mettent l’eau à la bouche

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Ils nous mettent l’eau à la bouche

Boire l’eau du robinet, un geste simple et sans danger grâce à des professionnels qui s’investissent 24 heures sur 24. Rencontre avec les fontainiers de Crans-Montana qui veillent sur l’imposant réseau d’eau communal.

Depuis que je fais ce boulot, chaque fois qu’il pleut, je suis heureux », confie Louis-Philippe Berclaz en observant le ciel chargé de nuages par la fenêtre des locaux du Service des eaux de Crans-Montana, au-dessus du village de Mollens. Depuis 2003, l’eau est au cœur de la vie professionnelle de ce natif de Loc. En 2009, il décroche le brevet fédéral de fontainier. Un joli titre qu’il aime à  définir par « la personne qui garantit aux citoyens la distribution d’une eau potable de qualité  irréprochable et en quantité suffisante ». Au Service des eaux de Crans-Montana, qu’il dirige depuis 2017, disposer du brevet fédéral de fontainier est un prérequis.

 

En ce mercredi matin, le chef et ses six collaborateurs se réunissent à 7 heures pour le briefing quotidien. Au programme, un point sur les travaux effectués la veille, les éventuels problèmes survenus durant la nuit, les tâches du jour, et l’indispensable consultation de l’ordinateur qui trône dans un petit bureau du service : une interface web qui permet de visualiser, d’analyser et de commander à distance l’entier du réseau d’eau communal. Jonathan Savioz et son coéquipier passent en revue le secteur est (Randogne-Mollens) dont ils sont responsables. Débit des diverses sources, état des conduites, des réservoirs et des collecteurs, potabilisation… : R.A.S. Il est presque 8 heures, les binômes partent sur le terrain.

LA FUSION DE L’EAU

De la source au robinet, l’eau passe par plusieurs étapes. Elle est d’abord captée dans une vingtaine de sources, rivières, torrents ou lacs de la commune, puis elle s’écoule via des canalisations vers l’une ou l’autre des cinq stations de potabilisation. 

Là, elle est filtrée puis traitée pour la rendre consommable. Le précieux liquide est ensuite stocké dans une trentaine de réservoirs disséminés sur le territoire, avant d’être distribué via le réseau d’eau potable. L’eau est consommée par les ménages, utilisée par exemple pour l’irrigation, et une part est réservée aux pompiers.

Depuis la fusion des communes en 2017, nous pouvons jongler avec les réserves d’eau du territoire. Nous avons grandement gagné en efficacité et en maîtrise des coûts »,

explique Louis-Philippe Berclaz. « La réunion des quatre services des eaux permet aussi de nous confronter à des systèmes et des techniques très différents », complète Jonathan Savioz.

Reste le problème du stockage, de plus en plus aigu pour la commune qui ne possède pas de barrage. « Avec une neige plus rare et une fonte très rapide, une grande quantité d’eau se perd dans le Rhône sans que nous ayons la capacité de la stocker. Si bien que lors d’étés caniculaires et secs, lorsque la population et les besoins augmentent notamment en station, nous pouvons nous retrouver en situation de pénurie », précise Louis-Philippe Berclaz.

Mais pour le chef du Service des eaux, un seul projet « essentiel pour les générations à venir » permettra de résoudre le problème du stockage de l’eau et donc de pénurie : le projet Lienne-Raspille. Espéré à l’horizon 2030, son but est de stocker l’eau de fonte de printemps dans le barrage de Tseuzier pour la redistribuer dans les réseaux des huit communes parties prenantes, dont Crans-Montana, Icogne et Lens.

200 KM DE CONDUITES

Sur le terrain, entre 600 et 2260 m d’altitude, les fontainiers effectuent d’innombrables tâches : contrôler et entretenir les stations de potabilisation, les réservoirs, et pas moins de 200 km de conduites ; prélever des échantillons d’eau pour en vérifier la qualité ; intervenir, parfois en urgence, de jour comme de nuit et par tous les temps pour réparer une fuite, ou encore assurer que les bornes d’incendie soient bien accessibles. « Il faut avoir une conscience professionnelle exemplaire, car nous touchons à une denrée alimentaire. Les gens comptent sur nous », note Jonathan Savioz.

Louis-Philippe Berclaz n’est pas peu fier de ses collaborateurs « compétents, dynamiques, et qui répondent tous présents en cas de coup dur. » Une équipe souvent citée en exemple dans la commune.

  1. Jonathan Savioz apprécie la diversité de son travail de fontainier. « Là, les journées sont chargées, c’est le rush du printemps. »

  2. La capacité du lac de Chermignon a été doublée. Des pics de consommation d’eau sont observés dans la commune en été et à Nouvel An, entre 17 et 21 heures.

  3. Du captage au robinet, l’exploitation du réseau d’eau potable de la région de Crans-Montana est gérée et contrôlée par les fontainiers. Chaque commune a ses équipes.

Légende photo : Le Service des eaux de Crans-Montana compte cinq fontainiers avec Louis-Philippe Berclaz (au second rang, 2e à gauche), et deux en passe d’être formés. L’équipe assure un piquet 7 jours sur 7. Le dimanche de Pâques à 18 heures, une rupture de canalisation a été signalée ; à 23 h 30, la situation était rétablie. © Luciano Miglionico

14 MILLIONS DE FRANCS INVESTIS POUR L’EAU

Deux ans de travaux ont permis de doubler la capacité du lac de Chermignon à Plans-Mayens, qui s’élève désormais à 300 000 mètres cubes. La digue, qui ne répondait plus aux normes sismiques, a été renforcée, mais aussi rehaussée de 5,95 m. Coût total : environ 11 millions de francs, financés par la commune, le canton et la Confédération. L’eau du lac est captée pour le réseau d’eau potable, l’irrigation agricole, l’enneigement du domaine skiable ou encore l’arrosage du golf. En prévision de l’inauguration de l’ouvrage le 14 juin, la place de pique-nique a été reliftée, avec notamment un nouveau mobilier et trois nouvelles cheminées doubles en pierre de St-Léonard pour raclettes et
grillades.

En mai dernier, les communes de Crans-Montana et de Noble-Contrée ont inauguré la station de potabilisation à proximité de la grotte de Raugea, à Mollens, territoire qui concentre environ un tiers des sources communales. L’installation, dont le coût est estimé à 2,6 millions de francs financés à parts égales par les deux communes, traite les eaux par ultrafiltration, « une technologie de pointe », indique Louis-Philippe Berclaz, chef du service des eaux de Crans-Montana.

Sur le terrain avec Claude Duchoud, fontainier à Icogne

EN VIDEO - Malgré la complexité des réseaux et le nombre important d’infrastructures (sources et captages, conduites, installations de filtration, réservoirs, turbinages, réserves incendie, etc.), la gestion de l’eau entre Lienne et Raspille fonctionne remarquablement bien. Elle repose sur une bonne coordination entre les services communaux et sur le dévouement des employés.

Dans ce reportage de Pierre-Armand Dussex, Claude Duchoud, employé du service des travaux publics de la commune d’Icogne et récemment titulaire du brevet de fontainier, partage son quotidien et exprime ses préoccupations face aux variations climatiques qui pourraient rendre sa mission plus difficile.

 



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