
Une mécène providentielle et inspirée
Une mécène providentielle et inspirée
Amatrice éclairée d’art, Bérengère Primat offre une seconde vie au centre culturel de Lens. Dès le 16 décembre, l’exposition inaugurale de sa Fondation Opale accueille en 1re mondiale une rétrospective des œuvres de Yann Arthus-Bertrand.
Vous avez l’ambition de marier l’art aborigène et l’art contemporain. N’est-ce pas contradictoire ?
L’art aborigène est tout à fait contemporain. S’il s’inspire des traditions, il est vivant et donc actuel. L’art contemporain, lui, va bien au-delà d’une mode, il constitue une opportunité de création originale. Nous souhaitons instaurer un dialogue entre les différentes expressions artistiques. Dès juin 2019, nous accueillerons des artistes en résidence qui réaliseront des œuvres spécialement pour les exposition présentées. Dans la même idée, nous poursuivrons l’organisation d’événements parallèles comme des conférences ou des ateliers pour les enfants. Nous revaloriserons aussi le restaurant, rebaptisé L’Opale, toujours avec la volonté de faire de la Fondation un lieu de rencontres ouvert à tous les arts et à tous.
Qu’est-ce que l’art aborigène a de plus par rapport à une autre forme d’art ?
Le lien qu’il crée avec la Terre, en tant que Mère nourricière. À travers l’art, les Aborigènes expriment le « temps du Rêve ». Il ne s’agit pas d’un rêve nocturne tel que compris dans notre culture, mais de la capacité à relier le présent que l’on vit à celui qui est considéré comme le présent éternel, soit la période où les ancêtres ont créé le monde. Lors de cérémonies, les Aborigènes passent d’un temps à l’autre et retranscrivent le savoir ancestral dans leurs peintures.
Quels liens tissez-vous entre les Aborigènes et les Valaisans ?
Tous les deux possèdent un fort rapport à la terre et sont fiers de leurs origines. Je trouve cet attachement très beau. Les anciens Valaisans connaissent bien l’histoire de leur région. La tradition orale est encore active. Lors de la dernière exposition de la Fondation sous l’appellation Arnaud et ma première consacrée à l’art aborigène, de nombreux visiteurs — toutes générations confondues — ont témoigné leur satisfaction à redécouvrir ce qui fait l’authenticité d’une communauté.
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UN ESPRIT POSITIF Pour les Aborigènes, humain, végétal et animal sont au même niveau. Leur art évoque souvent l’écologie. Offerte par un artiste, cette tortue est réalisée avec des filets de pêche abandonnés par l’industrie. Ces filets fantômes détruisent la faune. Récupérés, ils sont tissés sous la forme des animaux qui en sont victimes. Du négatif naît du positif.
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ENVIE DE TRANSMISSION Chez les Aborigènes, chaque clan est « propriétaire » d’un territoire, c’est-à-dire qu’il en est responsable et veille à sa prospérité harmonieuse. Ce catalogue d’exposition est important pour moi, c’est le premier présentant ma collection. Sorti à l’occasion du dernier accrochage de la Fondation Arnaud, il aborde largement le thème de la transmission.
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DES LIENS FORTS Cadeau porte-bonheur de ma maman, ce bracelet a une forte dimension sentimentale. Il a été béni par Amma, figure spirituelle indienne. Il vient d’Inde, où à 17 ans, j’ai voyagé pour la première fois seule. J’ai été très touchée par sa population, ses valeurs, sa culture. J’envisageais de participer à l’œuvre de Mère Teresa, la vie en a décidé autrement.
Légende photo : Bérengère Primat, © Olivier Maire