
Trois hommes, des bolides et des pentes
Trois hommes, des bolides et des pentes
Eddy Tapparel, Frédéric Bonvin et Frédéric Rey participent à plusieurs manches du championnat suisse des courses de côte. Une chasse au chronomètre, mais surtout une passion commune dévorante.
Ils partagent la même passion enivrante, la même envie de se sublimer au volant d’un bolide. Surtout lorsque la pente est sévère, accidentée, sertie de pièges, d’épingles et de virages. Eddy Tapparel (48 ans) de Montana-Village, Frédéric Bonvin (38 ans) de Crans-Montana et Frédéric Rey (38 ans aussi) de Chermignon-d’en-Bas, sont les trois pilotes « du coin » à participer – pour certains depuis belle lurette – à quelques manches du championnat suisse des courses de côte. Qui réunit des épreuves comme Ayent-Anzère ou Massongex-Vérossaz pour citer deux exemples concrets un tant soit peu connus du grand public valaisan.
Les ambitions sont différentes, le matériel également (Tapparel roule sur Opel, Bonvin sur BMW et Rey sur Audi), mais le discours est similaire sur toutes les lèvres. « Nous aimons la vitesse, ce privilège de sentir qu’il y a quelque chose sous le capot, sous la pédale, clament-ils d’une seule voix. Le sport automobile nous permet de nous défouler, dans le bon sens du terme, sans penser à Via Secura, et d’éviter ainsi toute tentation au quotidien, sur des routes fermées ou fréquentées. »
Et Eddy Tapparel, le plus expérimenté et le plus polyvalent du trio, d’insister : « Nous pratiquons notre sport dans des conditions proches du risque zéro. Les voitures sont aménagées, les endroits dangereux sécurisés. Même si chaque course déplore son lot de sorties de route, les chocs graves sont extrêmement rares. »
LE REVERS DE LA MÉDAILLE
Certes, mais pourquoi la côte plutôt que le circuit ou le rallye, disciplines plus classiques du sport automobile ? « Pour une question de budget », assène en toute franchise Frédéric Bonvin. « Parce que, gamin, Ayent-Anzère m’a toujours fasciné. Entendre le ronronnement des moteurs dans les montagnes, c’est bien, mais vivre cette expérience de l’intérieur, c’est beaucoup mieux ! », poursuit Frédéric Rey. « Pour moi, la côte s’est révélée être la suite logique du slalom de par la similitude de la voiture, mais avec des sensations beaucoup plus fortes », précise Eddy Tapparel. Mais tous avouent cependant leur volonté de bifurquer, tôt ou tard, sur le rallye.
Reste – et c’est le revers le plus douloureux de la médaille – que cette passion n’est pas à la portée de toutes les bourses. Entre les licences, les inscriptions aux courses, les aménagements de la voiture et les pneus, sans compter l’acquisition du véhicule de base, une saison – qu’elle soit complète ou partiellement minée par la pandémie – coûte cher. À plus forte raison si le pilote vise le sommet de la hiérarchie de sa catégorie. Tapparel évoque un millier de francs par course, Bonvin articule le chiffre de 7000 francs par année, alors que Rey parle de 5000 à 15 000 francs par saison, selon le nombre de manches disputées. Mais quand on aime, on ne compte pas.
Légende photo : Frédéric Bonvin, Eddy Tapparel et Frédéric Rey (de gauche à droite) : plein gaz sur les courses de côte ! © Blaise Craviolini
ILS AVALENT LES CÔTES PIED AU PLANCHER !
Blaise Craviolini dresse le portrait des trois pilotes de la région sous la forme d’un entretien « vroum-vroum ».
Eddy Tapparel : « Aller plus vite que le temps »
De Montana-Village, 48 ans, maître-électricien, divorcé, deux grands enfants, sociétaire de l’Écurie 13 Étoiles, aime la mécanique en général, le ski, la grillade et la raclette.
Vos premiers pas dans le sport automobile ?
C’était au Slalom de Sion en 1996, comme la majorité des pilotes valaisans des années 90.
Qu’est-ce qui vous a motivé à en faire ?
J’avais suivi à plusieurs reprises le Slalom des Casernes et l’envie d’y participer me démangeait. J’avais une Opel Manta en fin de vie. Avec un pote, nous l’avons retapée et préparée sommairement à cet effet. À l’époque, la catégorie 4 était ouverte aux autos non expertisées et aux pilotes dotés d’une licence journalière. C’est aujourd’hui une utopie !
Pourquoi la côte plutôt que le rallye ou le circuit ?
La côte a été la suite logique du slalom de par la similitude de la voiture, mais avec des sensations beaucoup plus fortes. Le circuit était moins à ma portée, bien qu’il existait des manches du championnat suisse à l’étranger. Le rallye m’a toujours fait rêver. Ces dernières années, j’ai participé à quelques épreuves en qualité de navigateur. Je suis un véritable touche-à-tout des sports mécaniques: j’ai aussi pratiqué un peu de course sur glace et même du 4x4 en Jeep.
Pour vous, la course de côte, c’est… ?
Un week-end de détente entre amis, une bonne organisation, quelques reconnaissances de la montée, des essais chronométrés et des manches en course avec – parfois – une grosse frayeur ! Les résultats sont plus ou moins bons, mais l’essentiel, c’est surtout ce sentiment d’aller plus vite que le temps…
Votre bolide du moment ?
J’ai plus d’une centaine de départs, toutes disciplines confondues, à mon actif et cours actuellement sur une Opel Kadett C de 1978 en catégorie E1 jusqu’à 2 litres de cylindrée. Il s’agit d’une des classes les plus disputées dans les voitures dites fermées. Nous sommes souvent plus de 30 pilotes en lice dans cette catégorie spécifique.
Votre palmarès ?
Je peux m’enorgueillir de quelques victoires en slalom (premier de classe à Tourtemagne, au Mandemant et aux Paccots en 2002) et de quelques résultats notoires en côte, notamment lors de l’édition 2015 de Massongex-Vérossaz.
Frédéric Bonvin : « De l’adrénaline pure et dure »
De Cans-Montana, 38 ans, concierge, marié et père de deux fillettes de 10 et 7 ans, confesse un petit « faible » pour le vélo et les bons restaurants.
Vos premiers pas dans la course automobile ?
Ils ne datent pas d’aujourd’hui. Si je m’en souviens bien, c’était en 2008 à l’occasion du Slalom de Carouge.
Qu’est-ce qui vous a motivé à en faire ?
Depuis tout gamin, j’ai toujours eu une attirance et une affection particulières pour la vitesse. Pour assouvir cette envie, je me suis dit que c’était mieux… de rester dans la légalité. Je me suis donc lancé. Aucun regret: j’ai fait le bon choix et ne regrette rien !
Pourquoi la côte plutôt que le rallye ou le circuit ?
Essentiellement pour une question de budget. Pour le plaisir, aussi, de pouvoir rouler et m’éclater sur des routes habituellement limitées. Je ne vous cache cependant pas que j’aimerais bien m’essayer au rallye ces prochaines années.
Pour vous, la course de côte, c’est… ?
Des moments privilégiés partagés avec des copains, de l’adrénaline pure et dure et un plaisir incomparable.
Votre bolide du moment ?
Je roule en BMW M3 e36 en catégorie E1 3 litres (ndlr: c’est un peu technique, mais les connaisseurs apprécieront). Je suis toutefois en train de remonter une voiture pour 2022, de manière à pouvoir rouler en circuit, notamment sur le mythique Nürburgring en Allemagne.
Votre palmarès ?
Depuis 2008, j’ai obtenu quelques podiums en slalom, mais jamais en côte. Mon objectif, ces prochaines saisons, est de combler cette lacune. Je vais m’y atteler.
Frédéric Rey: « Le ronronnement des moteurs dans la montagne »
De Chermignon-d’en-Bas, 38 ans, gestionnaire de projet informatique, marié et papa comblé, président du Club Audi Suisse, initiateur de la page Facebook « T’es de Crans-Montana, si ». Entre autres implications dans la vie associative locale…
Vos premiers pas dans la course automobile ?
C’était en 2008, au Slalom de Drognens-Romont.
Qu’est-ce qui vous a motivé à en faire ?
La course permet de rouler dans un cadre sécuritaire sans risque de faire connaissance avec l’ami Via Sicura.
Pourquoi la côte plutôt que le rallye ou le circuit ?
Le circuit, c’est sympa pour prendre en main la voiture avant la saison, mais au bout d’un moment, j’ai tendance à m’ennuyer. Le rallye m’attire et reste un objectif à moyen terme. Comme cadeau d’anniversaire pour mes 40 ans, et en qualité de co-pilote de mon ami Frédéric Bonvin, pourquoi pas ? Ma passion pour la côte remonte à l’enfance, lorsque j’entendais ronronner dans la montagne les moteurs d’Ayent-Anzère. J’ai, depuis, cultivé cette passion.
Pour vous, la course de côte, c’est… ?
La liberté ! Je peux rouler avec la voiture que j’aime, la modifier et l’améliorer au fil des ans. Lorsque l’on part en compétition, on fait le vide autour de nous. On pense aux gens que l’on aime. Seules la concentration, l’adrénaline et l’envie de s’améliorer accaparent notre esprit.
Votre bolide actuel ?
Une Audi 100 S4 Quattro, qui a couru en endurance dans les années 90 en Belgique. J’y ai apporté quelques modifications au niveau du châssis, de la commande de la boîte à vitesses et géométriques.
Votre palmarès ?
Il attend d’être ouvert… J’ai très peu de bons résultats à mon actif. Mais à ma décharge, je n’ai pas consenti à tous les sacrifices financiers nécessaires au début et j’ai ensuite donné priorité à un projet professionnel. De plus, le virus m’a « grillé » une saison. Mais je sens bien ma nouvelle voiture et suis persuadé que je vais être plus compétitif ces prochaines saisons.