
Un nouveau souffle pour l’hôtellerie
Un nouveau souffle pour l’hôtellerie
L’offre hôtelière de la station est en plein boom. Des établissements sont rachetés, rénovés, agrandis. De grands groupes internationaux misent sur Crans-Montana, dont le luxueux Six Senses, qui vient d’ouvrir ses portes et s’engage à participer au développement durable de la région. Ce renouveau dynamise le secteur touristique en déployant un large éventail d’expériences, du palace à l’auberge de jeunesse en passant par l’hôtel familial.
Un imposant bâtiment a poussé en bordure des pistes de ski, à deux pas de la télécabine de Cry d’Er. Il s’agit du nouveau complexe hôtelier de la chaîne haut de gamme et écologique Six Senses. À l’intérieur, 78 chambres et de nombreux espaces de bien-être, dont un spa et deux restaurants ouverts au public. Ce 5 étoiles a accueilli ses premiers clients le 1er février dernier. Le même jour, le plus grand hôtel de la station, le Valaisia, repris et rénové par le groupe suisse Faern, a rouvert ses portes.
Depuis deux ans, d’autres établissements renaissent de leurs cendres ou prennent de nouvelles formes. L’Aïda est devenu un Relais & Château, le Bella Lui une auberge de jeunesse, le Green est désormais l’Alaïa Lodge, le Guarda Golf a été agrandi, le Crans-Sapins a été rafraîchi et renommé Chez Elsy et l’ancien Rhodania est en cours de transformation pour figurer dans la gamme premium de la chaîne Hyatt. Sans compter les projets qui sont en cours de concrétisation ou dans le pipeline, comme l’Aminona Luxury Resort and Village et le palace de Christian Constantin.
DESTINATION ATTRACTIVE
Après des années de déclin (de 5300 lits en 1985 à 2500 lits en 2019), l’hôtellerie trouve un nouveau souffle spectaculaire, à la satisfaction de Crans-Montana Tourisme & Congrès. « Nous sommes dans une spirale positive. On sait que plus il y a d’offres, plus il y a de demandes, plus les chaînes internationales s’intéressent à nous ! Et quand on connaît les méthodes de calcul de ces grands groupes internationaux pour choisir une destination, on peut se dire que Crans-Montana est vraiment attractive et que nous avons bien travaillé », se réjouit Jean-Daniel Clivaz, président de CMTC. Son directeur, Bruno Huggler, partage le même enthousiasme et table sur une augmentation de lits hôteliers de 40 à 60 % d’ici à 2027. « L’intérêt a grandi, car nous avons un potentiel pour le tourisme quatre saisons et une offre d’activités très diversifiée. Les grands événements à Crans-Montana donnent confiance aux investisseurs. » La politique concertée des trois communes pour stopper la transformation des hôtels en appartements et pour maintenir les zones hôtelières actuelles a également porté ses fruits.
Didier Bonvin, président de l’Association hôtelière de Crans-Montana, gère son établissement familial Ad’Eldorado depuis trente ans. Il voit l’arrivée des grandes chaînes d’un très bon œil. « Ces marques sont adoptées par une clientèle fidèle, qui génère des touristes suiveurs. Leur présence aura un effet dynamisant pour tous les autres établissements. » Avec un large éventail de catégories de 50 à 1000 francs la nuit, l’offre hôtelière colle parfaitement avec le positionnement « tous publics » de la destination. Ce mix entre différents types de touristes, le gérant de l’auberge de jeunesse Nicolas Witschi y tient particulièrement. « En plus des 37 chambres doubles, nous proposons 16 chambres à quatre ou six lits afin d’accueillir des écoles et des groupes à un prix avantageux. Cette ambiance entre clients de différents horizons est très sympathique. »
ENGAGEMENTS DURABLES
Les nouveaux acteurs hôteliers ne viennent pas seulement pour profiter d’un territoire, mais aussi pour le faire vivre. Ces sociétés disposent de moyens marketing importants et d’un positionnement parfois très bénéfique pour les communes. Par exemple, avec sa philosophie axée sur le développement durable, le Six Senses s’engage à privilégier les fournisseurs locaux et à préserver l’environnement. « Nous allons commencer par réparer les dégâts causés par la construction. Nous avons dû arracher 66 arbres, nous en replanterons 200 d’ici à 2025 », annonce Dominic Dubois, responsable du développement durable de l’établissement, dont le 0,5 % des recettes sera investi dans des projets écologiques et sociaux de la région. Le boom de l’hôtellerie va également générer des centaines d’emplois à l’année. Jean-Daniel Clivaz estime que « ce sera un plus pour l’économie locale, mais également un défi en termes de logements, de mobilité et d’infrastructures à l’avenir. »
Légende photo: Les hôteliers de la station, comme la famille Bonvin de l’Ad’Eldorado, voient d’un bon œil l’arrivée de chaînes internationales, qui placent Crans-Montana sur la carte du monde et reconnaissent l’attractivité de la destination. ©Luciano Miglionico
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Responsable du développement durable du Six Senses, Dominic Dubois souhaite investir dans des projets écologiques et sociaux en collaboration avec les acteurs locaux.
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L’ancien Rhodania est en cours de transformation pour figurer dans la gamme premium de la chaîne de luxe Hyatt. Il devrait ouvrir ses portes durant l’hiver prochain.
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L’hôtel historique Bella Lui, repris et rénové par les Auberges de Jeunesse Suisses, privilégie les rencontres entre visiteurs de tous horizons.
NOUVELLES TECHNOLOGIES AU SERVICE DE L’HOSPITALITÉ
Dans le contexte de crises successives qui agitent le monde, les machines connectées et les nouveaux systèmes de gestion ou de l’information viennent bouleverser notre quotidien. L’hôtellerie, la restauration, l’aviation, les EMS ainsi que tous les autres lieux qui pratiquent l’accueil n’échappent pas à cette révolution. Mais les robots et les écrans vont-ils forcément devenir la norme et supplanter les réceptionnistes et autres barmen ? La réponse de Pablo Garcia, directeur de Spark, se veut directe et rassurante : «Malgré l’arrivée massive de ces technologies, l’humain restera toujours au cœur des métiers de l’hospitalité.»
Une salle du Spark, Les Roches, ©Luciano Miglionico
Sur le campus de l’École des Roches, le laboratoire d’innovation technologique dispose de salles de classe dotées des derniers casques de réalité virtuelle, de caméras vidéo hi-tech et des systèmes de montages audiovisuels. L’une des vocations de ce matériel est d’offrir de nouveaux services à la clientèle et d’enrichir leurs séjours par des expériences inédites. Les progrès spectaculaires accomplis par les robots conversationnels ou l’intelligence artificielle ouvrent des perspectives encore plus vertigineuses : «Tout le monde a entendu parler des blockchains, qui concernent les cryptomonnaies, mais qui permettent aussi de sécuriser la propriété d’un fichier digital ou de valider un contrat. Nos étudiants font des travaux pratiques qui leur font expérimenter et comprendre ces nouveaux outils», souligne Pablo Garcia.
Mais ces dispositifs doivent-ils forcément remplacer les personnes physiques ? Le directeur de Spark ne le pense pas un seul instant : «Nous pensons que le futur de l’hospitalité, c’est davantage d’humains qu’aujourd’hui ; nos études le montrent depuis trois ans. Les technologies, ce sont surtout des informations destinées à aider les clients et à améliorer les services, tout en facilitant le travail du personnel. Prenons par exemple un check-in pour un hôtel trois étoiles. Il peut très bien être automatisé par reconnaissance biométrique et faire ainsi gagner un temps précieux. C’est peut-être utile pour ce type d’établissement, mais pas forcément pertinent pour un hôtel de luxe. C’est important de bien choisir les endroits où peuvent être déployés les différents systèmes.»
Une salle du Spark, Les Roches, ©Luciano Miglionico
Cette philosophie, qui consiste à réfléchir aux bons usages des outils, est inscrite dans les gènes de l’École des Roches depuis sa création en 1954. En restant en contacts étroits avec les entreprises crées par ses anciens étudiants, l’établissement a non seulement accumulé une expertise en matière d’hospitalité, mais elle a aussi développé une vision claire sur les enjeux du numérique. C’est dans cet esprit que Pablo Garcia a réuni des personnalités issues d’horizons différents : «Nous avons entrepris de développer un grand écosystème en rapprochant des sociétés technologiques et de l’hospitalité, la promotion économique de la région, Crans-Montana Tourisme ainsi que les HES.» Et dans cet écosystème, chaque acteur occupe une place bien définie : «Spark a choisi de mettre au centre de ses réflexions les aspects liés aux usages des technologies, en laissant aux ingénieurs les questions purement techniques.»