
Vignes : le salut vient du ciel
Vignes : le salut vient du ciel
Esprit d’entreprise et intérêt pour l’innovation, Michel Duc a conjugué ces deux qualités pour mettre au point une installation de sulfatage par drone. C’est le résultat de 25 années d’expérience du monde viticole et de connaissances techniques de cet ingénieur.
Grand-père instituteur et vigneron, père propriétaire-encaveur, le jeune Michel a baigné dans l’univers de la vigne. Diplôme d’ingénieur en viticulture et œnologie en poche, il monte sa propre cave. Homme de projets, il pilote la construction du réseau d’irrigation des vignes de Chermignon, avant de prendre la direction d’une des plus importantes caves valaisannes.
De retour dans ses vignes – un domaine morcelé de 5 ha – et de 18 cépages différents ( ! ), il est confronté à la difficulté de sulfater ses 50 parcelles. Et si le drone était la solution ? En 2018, il effectue ses premiers essais avec cette technologie naissante. Un ami encaveur qui le surprend un jour en train de faire voler son engin l’interpelle : « Tu t’es offert un nouveau jouet pour Noël ? » Il perfectionne son « jouet » et crée une installation pour arrimer le drone sur camionnette. Eurêka : tout fonctionne ! Ce qui lui permet de lancer son entreprise : Bubo, du nom latin du hibou grand-duc, blason de sa famille.
Je souhaitais proposer une solution de traitement efficace et viable économiquement. Il fallait optimiser les procédures de travail »,
explique Michel Duc. Et de souligner l’avantage de son système. Un pilote de drone, à lui tout seul, traite 4 hectares par matinée, alors qu’une équipe au sol n’en fait environ que 1,5 ha. Et l’opérateur de drones est assis à l’extérieur, loin des produits qu’il ne risque pas d’inhaler. Un atout pour la santé.
ADAPTÉ À LA TOPOGRAPHIE
Le drone est adapté à nos vignobles de coteaux difficiles d’accès et peu mécanisables. Il a l’avantage de la précision et d’une répartition homogène des produits vu sa proximité des ceps. Cela permet de soigner des vignes jusqu’à 5 mètres des maisons contre 60 mètres pour l’hélicoptère qui occasionne davantage de dérives des produits. Les résultats ? « Les retours des professionnels sont positifs. Je suis en contact avec un réseau de viticulteurs partenaires qui nous permet de signaler les traces de maladies et d’échanger nos expériences. Nous devons être proactifs ! », s’enthousiasme Michel Duc.
Client de Bubo, Jean-Marie Pont souligne l’excellent rapport qualité-prix et le gain de temps. « Auparavant, il me fallait trois matinées pour traiter mes 4 ha de vignes. Sans parler de l’économie du volume de produits utilisés qui est divisé par dix », explique le propriétaire-encaveur de Corin. Et d’assurer que le drone offre une bonne protection du feuillage, mais il faut être attentif à l’état des grappes en cas de forte pression des maladies (mildiou, oïdium…).
DES PILOTES SUPER CRACKS
Piloter un drone exige une solide formation. Bubo a engagé deux spécialistes, issus de l’armée de l’air française. Ces officiers ont effectué cinq années d’école et dirigé des drones militaires de combat de 20 mètres d’envergure à plusieurs millions par pièce… Pas de quoi être impressionnés par les drones de sulfatage de 3,60 m.
Ces vols sont régis par l’Office fédéral de l’aviation civile (OFAC) dont les exigences sont draconiennes. S’agissant d’un domaine nouveau, l’entrepreneur de Chermignon a travaillé en étroite collaboration avec l’autorité fédérale. « On s’informe mutuellement. Ainsi le responsable de l’OFAC a participé à mes expériences de vols de nuit avant de donner son feu vert », explique Michel Duc.
Pourquoi traiter la nuit ? Il y fait moins chaud, il y a moins de vent, l’air est plus humide et il n’y a pas de trafic sur les routes ni de gens dans les vignes. De plus, le drone, fort peu bruyant, ne réveille pas les dormeurs.
Cette méthode de traitement est promise à un bel avenir. Sans publicité, Bubo enregistre une croissance de 30 % par an. Mais pas question de trop grandir. « Nous limitons notre activité dans le périmètre du district de Sierre afin d’adapter notre stratégie phytosanitaire aux conditions locales. »
Plus d'infos : bubo-viti.ch
Légende photo : Plus précis, moins gourmand en produits, le drone offre de multiples atouts aux vignerons pour le traitement des maladies de la vigne. © Luciano Miglionico
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Inspirer nos voisins En plein essor, l’entreprise valaisanne Bubo soigne 1200 parcelles de 170 viticulteurs (70 ha) de notre région. À noter que la Suisse inspire la France en matière de sulfatage des vignes, domaine dans lequel notre pays est en avance.
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Agir avec responsabilité La camionnette sur laquelle trône le drone dans le tunnel de lavage phytosanitaire de Valençon. L’installation permet de nettoyer les cuves de sulfatage chargées de résidus de produits. Une opération indispensable pour empêcher de contaminer le sol ou les cours d’eau.
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Diffuser à large échelle Expert en drones et responsable d’une école de pilotage, le Français Gauthier Veltri a réalisé un reportage vidéo sur le travail de l’équipe de Michel Duc (à droite sur la photo). Il sera diffusé sur la chaîne de ce créateur de vidéos qui fait référence dans le monde francophone.